Fais attention à ce que tu souhaites

Fais attention à ce que tu souhaites

Article publié le 30 mai 2011 sur le blog Radio Coraline

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Adapté d’un conte de Neil Gaiman, Coraline de Henry Selick nous présente Coraline Jones, une jeune fille qui déménage avec ses parents dans une étrange et vieille maison perdue au milieu de nulle part. Ennuyée par ce paysage triste et par le manque d’attention dont fait preuve sa famille à son égard, elle rêve d’une vie plus amusante et plus colorée. C’est alors qu’elle remarque la forme d’une porte dans le papier peint, derrière laquelle l’attend une version alternative de sa propre vie…

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Coraline est une exploratrice : rien ne lui plaît plus que de parcourir le voisinage pour découvrir ce qui s’y cache. Qu’importe la pluie, qu’importe la boue, un k-way et des bottes et c’est parti vers l’inconnu ! Malheureusement, sa mère n’apprécie guère la témérité de sa fille en ce temps orageux, craignant qu’elle ne salisse tout en jouant dans la boue. Ses parents ont beau travailler dans la botanique, ils n’ont pas la main verte. Ils sont plutôt du genre rivés sur leurs ordinateurs, ramenant à la maison leur projet de catalogue de jardinage qui occupe tout leur temps. Devant ce manque évident de communication, la fille négligée, interprétée par Dakota Fanning, ronge son frein en alternant les moues et les bons mots. Alors qu’on la sollicite pour compter le nombre de fenêtres de la maison et qu’elle découvre des insectes dans la douche, la mystérieuse porte soudain découverte a des allures d’aubaine. De l’autre côté du miroir, la nourriture sent bon, on boit du milkshake à la mangue, nos parents nous aiment et viennent nous souhaiter bonne nuit. Elle y resterait bien… Certes, ses autres parents ont d’étranges boutons de chemise à la place des yeux, mais il y a aussi un cirque de souris, deux vieilles actrices passées de mode, un Wybie muet et son étrange chat noir… Tout semble fait pour satisfaire Coraline, mais est-ce vraiment ce qu’elle souhaite ?

Coraline a été réalisé en stop motion, c’est à dire image par image. Une technique certes laborieuse mais au charme inimitable, qui s’est imposée alors que les images de synthèse et même des prises de vue réelles étaient aussi envisagées. Comme l’expliquait Henry Selick dans une interview à L’Ecran Fantastique publiée en juin 2009 :

J’ai procédé à un test. Nous avons réalisé un petit bout de séquence en utilisant les deux techniques (…). Et le résultat ne laissait pas de doute : c’était la bonne vieille stop-motion qu’il fallait utiliser. C’est elle qui avait gagné le concours !

Chaque personnage a été réalisé en plusieurs exemplaires, leurs visages coupés en deux pour que la bouche soit remplaçable à volonté, selon les expressions faciales. Si on ne s’en rend pas compte à l’écran, c’est que ce trait est gommé par ordinateur, comme le précisait le réalisateur dans un autre entretien paru le même mois chez Technikart :

J’aurais bien laissé le trait, mais on m’a convaincu que c’était mieux de l’enlever. Les animateurs se battent toujours pour que tout soit le plus fluide et le plus parfait possible. Moi, j’ai plutôt tendance à vouloir laisser des menues imperfections, pour qu’on sente la poésie du fait main.

Selon Henry Selick, 95 % du film a effectivement été réalisé à la main, les 5 % restants consistant à améliorer deux ou trois choses par-ci par-là. Coraline a été filmé en relief, en vue d’une diffusion 3D dans les salles équipées, une première pour un long-métrage en stop motion. Ceux qui l’ont vu ainsi évoquaient quelques passages intéressants tout en regrettant que le procédé ne soit pas plus exploité. L’illustrateur japonais Tadahiro Uesugi, dont vous pouvez lire une interview illustrée de ses dessins, a oeuvré sur les décors. La bande originale a elle été confiée au Français Bruno Coulais, qui a eu recours à des sonorités traduisant l’étrange et le merveilleux, faisant chanter une chorale d’enfants dans une langue imaginaire. Une chanson au piano est interprétée par le chanteur de They Might Be Giants.

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Et Neil Gaiman, qu’en pense-t-il de ce Coraline ? A en croire ses déclarations à Technikart, il a aimé. Il y racontait les mésaventures qui l’ont poussé à choisir avec attention les réalisateurs qui l’adapteront :

Terry Pratchett et moi-même essayions d’adapter De bons présages. On se croyait plus malins que ces gens d’Hollywood. Enfermés pendant des semaines au Château Marmont, on écrivait des scènes l’après-midi, qu’on faxait le soir au studio. Le lendemain matin, aux réunions avec les executives, c’était évident que personne ne les avait lues. C’était ubuesque… et génial. Moi qui ne m’intéresse pas à l’argent mais au fait d’avoir de jolis films tirés de mon oeuvre, j’ai beaucoup appris.

18 mois avant la sortie du livre, le contrat avec Henry Selick était déjà signé, selon l’écrivain. Un film d’Henry Selick en stop motion, (c’est) exactement comme je l’avais rêvé, confiait-il. Ses rêves sont les nôtres.

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